dimanche 22 mai 2011

Média: Qu’est devenue la confraternité au Niger ?

Après la commémoration en grande pompe le 3 mai dernier, de la journée mondiale de la liberté de la presse, il nous parait nécessaire de nous attarder sur un phénomène qui prend de plus en plus de l’ampleur dans le milieu médiatique de notre pays : il s’agit de la mise à rude épreuve du principe sacro-saint de la confraternité entre journalistes. Il est devenu de plus en plus fréquent de voir des confrères de la place se livrer à des attaques en règle  dans les colonnes de leurs journaux à d’autres confrères, les vilipendant et les chargeant de tous les péchés d’Israël. Ce sont là des manières de faire peu courtoises et pas confraternelles du tout. Le Niger, ce pays que nous partageons est vaste certes, mais nous avons le mérite de nous connaître les uns les autres au moindre détail près.
Et c’est certainement en prélude aux rudes batailles de positionnement qui se préparent autour, aux alentours et à la périphérie du nouveau président de la république Issoufou Mahamadou, que certains de nos confrères se prêtent et jouent ce jeu dangereux qui consistent à dénigrer et à discréditer d’autres confrères,  qui en réalité n’ont fait que leurs devoirs. Passe encore que ceux qui aujourd’hui ont le loisir d’écrire ce que bon leur semble, avaient à un moment ou à un autre de leur histoire travaillé au sein de l’administration nigérienne. Pire, nous avons oui dire que certains d’entre eux n’avaient pas été des fonctionnaires exemplaires dans ces structures étatiques, para publiques ou privées ; certains avaient même été en taule pour prédation, mauvaise gouvernance et indélicatesses. Au finish, certains de ces anciens tolards avaient embrassé le métier de journalisme devenu pour eux une véritable sinécure : ils se sont facilement enrichis en colportant des fausses nouvelles d’un salon douillet à un autre en se faisant payer au prix fort. Ceux qui aujourd’hui crient au loup dans la bergerie, avaient été pires que les loups, il y a encore quelques années. Comme dirait l’autre, nous sommes au Niger et on se connait tous. Aussi, nous estimons qu’il est temps, il est même grand temps que désormais chacun tienne tranquillement sa langue dans sa bouche, ou plutôt sa plume dans sa main ; car si on se mettait tous à écrire les uns contre les autres et à tirer sur tout ce qui bouge, l’avenir du journalisme risque de s’assombrir davantage au Niger.  Et il appartient à chacun de nous, surtout à ceux qui se considèrent comme de vrais professionnels ayant l’amour du métier et non pas seulement de ce qu’il génère d’éviter systématiquement de lier  cette profession à tout ce qui peut la priver de sa noblesse, de son  indépendance rédactionnelle et de prévenir toutes tentatives de manipulation.
C’est cela le combat qui pour les journalistes peut véritablement avoir un sens aujourd’hui, c’est le combat quotidien et permanent pour la liberté de la presse, pour le respect de l’éthique et de la déontologie, contre les mauvaises pratiques journalistiques. Nous devons garder cette ligne de conduite en dépit de la situation de misère dans laquelle nous végétons tous. Non, pas tous, car nous connaissons quelques confrères qui pour quelques broutilles sont prêts à se prostituer et déshonorer la famille journalistique. D’ailleurs ils sont connus de tous, ces gars aux intestins fragiles qui arpentent et rasent nuitamment les murs de certains dignitaires. Il n’est guère surprenant de lire le contenu de leur publication le lendemain matin. Un véritable panier à crabe où tout passe à la trappe : des politiciens en mal de sensation, des syndicalistes vindicatifs, des membres de la société dite civile plaidant pour le remplissage de leur obole en billets de banque etc. Mais le pire est que nos confrères acceptent volontiers d’ouvrir leurs colonnes pour qu’elles servent de ring de pugilat entre des adversaires politiques les plus offrants.
Telle est la réalité de la situation dans laquelle vivent et travaillent les journalistes au Niger. Et comme le dit si bien la FIJ (Fédération Internationale des Journalistes) : « Il ne peut y avoir de Liberté de Presse quand les journalistes vivent des conditions de corruption, de pauvreté ou de peur ». Les règles éthiques et déontologiques constituent un principe essentiel pour la promotion et la sauvegarde de la dignité et de la respectabilité de notre profession, mais il est totalement  galvaudé. Mais cela n’est que le fruit de la qualité même de nos  medias et la formation professionnelle au rabais de nombreux animateurs qui s’agitent au sein de nos organes de presse. En somme, il faut non seulement la Liberté, mais aussi la Responsabilité et la Qualité. Car, un journaliste vivant et travaillant dans la précarité est peu enclin à respecter non seulement les principes professionnels, mais aussi et surtout l’éthique et de la déontologie, d’où l’urgence pour l’amélioration des conditions de travail dans cette multitude de journaux, radios et télévisions implantées dans notre pays.
Himadou Ali (Le Canard Libéré)

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